• Jean WIRTHL’image à l’époque romane : vingt ans après
  • Anne-Orange POILPRÉFigures christologiques ottoniennes et romanes : l’empreinte carolingienne
  • Chantal FRAÏSSELe cloître de Moissac : au-delà de la narration ?
  • Fuensanta MURCIA NICOLÁSAvant l’imago gothique : les images miraculeuses à l’époque romane (Xe-XIIe siècles) 
  • Cécile VOYERLes Évangiles de l’abbé Odbert de Saint-Bertin et la création à la fin du Xe siècle 
  • Quitterie CAZESChoix des images et choix des sculpteurs : un enjeu « politique » à Toulouse dans les années 1100 ?
  • Rémy CORDONNIERImages mnémotechniques et enseignement claustral : le cas du Traité des oiseaux de Hugues de Fouilloy (v. 1160) et de quelques cloîtres historiés du XIIe siècle 
  • Sébastien BIAYRéinventer les Vertus à Cluny 
  • Angélique FERRAND« La figuration du Zodiaque dans le lieu ecclésial comme mise en image(s) des rapports entre Ciel et Terre » 
  • Valentino PACED’Aversa à Brindisi : images de l’Italie normande à la fin du XIe siècle 
  • Xavier BARRAL I ALTETApproches historiographiques de l’image romane : des compilateurs du XIXe siècle aux nouvelles méthodes interprétatives sur la “vérité” des images 
  • Michel DESMIERLes peintures murales de l’église Nostra Senyora del Roure de Taillet (Pyrénées-Orientales) : nouvelles observations
  • Kornélia ROZSALes vestiges de l’église Saint-Frambourg fondée par la reine Adélaïde à Senlis 

 

Jean WIRTH

L’IMAGE À L’ÉPOQUE ROMANE : VINGT ANS APRÈS

 

Aux critiques justifiées ou non d’un livre que j’ai publié il y a vingt ans, j’ajoute les miennes. Je maintiens certes que l’iconographie constitue un système, sans quoi personne ne pourrait comprendre une image, que ce système s’articule sur des idéologies, comme celle du mépris du corps à l’époque de la réforme grégorienne, et qu’il est inséparable de la forme artistique. Mais il est vrai que l’ouvrage n’a pas été toujours assez sensible aux inflexions divergentes des différents foyers artistiques, tant il y avait lieu, avant toute chose, de restituer une chronologie. C’était particulièrement le cas pour l’art roman auvergnat qu’on situait en moyenne un demi-siècle trop tard. Les recherches récentes montrent que mes propres datations n’étaient pas trop hautes, comme certains le croient encore, mais parfois un peu trop basses. Par ailleurs, je ne prétendais pas résoudre tous les problèmes chronologiques et il y en a que je n’ai pas abordés, comme celui des chapiteaux du rondpoint de Cluny III et de la nef de Vézelay. Mon but était plutôt de tracer les évolutions essentielles. Si les travaux des vingt dernières années ont amené de précieuses révisions, tant sur les iconographies particulières que sur le déroulement des chantiers, ils n’ont guère concerné les grandes évolutions, face auxquelles ils témoignent d’une timidité sans doute excessive.


Quitterie CAZES

CHOIX DES IMAGES ET CHOIX DES SCULPTEURS : UN ENJEU « POLITIQUE » À TOULOUSE DANS LES ANNÉES 1100 ?

À Toulouse, deux sculpteurs ont marqué de leur empreinte la production artistique des deux sanctuaires majeurs que sont Saint-Sernin et Saint-Étienne autour des années 1100. Les deux ont inscrit leur signature sur leurs œuvres majeures, Bernardus Gelduinus à la fin de l’ inscription courant tout autour de la table d’autel de Saint-Sernin consacrée en 1096, Gilabertus sur les socles de deux des reliefs d’apôtres faisant partie du programme de la façade de la salle capitulaire de la cathédrale Saint-Étienne. Le présent article souhaite mettre en regard les productions de ces deux sculpteurs et proposer que leur choix, de la part des commanditaires respectifs, s’inscrit dans la tension née de la concurrence entre les deux sanctuaires, tout au moins que certains choix faits à Saint-Étienne ne se comprennent que par rapport à Saint-Sernin.


Anne-Orange POILPRÉ

FIGURES CHRISTOLOGIQUES OTTONIENNES ET ROMANES : L’EMPREINTE CAROLINGIENNE

Le IXe siècle carolingien est un moment essentiel dans l’élaboration de nouveaux types iconographiques christologiques dans lesquels la mise en image du Christ est repensée au regard des usages antérieurs. Les cycles de la vie du Christ et la figuration de la souveraineté divine s’ inscrivent dans une réflexion de fond sur les moyens visuels et leur capacité à traduire certaines dimensions de l’avènement christologique. Les Xe – XIIe siècles en héritent, par le biais des modèles artistiques, ainsi que des grands concepts de théologie politique formés au IXe siècle. Cette matière carolingienne est travaillée et repensée à l’aune de conceptions christologiques et sacramentelles nouvelles à l’ incidence marquante sur l’ iconographie. Une série d’exemples, principalement empruntés aux livres d’évangiles et évangéliaires germaniques enluminés des Xe et XIe siècles mais aussi de Francie occidentale, permettra de mettre en lumière certains aspects de ces transitions, et la façon dont
l’héritage carolingien est interprété.


Fuensanta MURCIA NICOLÁS

AVANT L’IMAGO GOTHIQUE : LES IMAGES MIRACULEUSES DANS L’ÉPOQUE ROMANE (XE-XIIE SIÈCLES)

Même si une partie des auteurs occidentaux n’étaient pas partisans pour considérer les images comme objets sacrés, vers l’an 1000 on peut trouver une attitude qui réfute leurs arguments, laquelle part de l’apparition des effigies miraculeuses. Cette culture écrite proposera un ensemble d’idées sur leurs propriétés thaumaturgiques et leur sacralité, qui se révèle dans certains motifs et formules iconographiques. Dans le présent article, on montrera la relation entre la tradition textuelle et visuelle pour comprendre l’évolution de ces images dans l’Occident Médiéval: leur individualisation comme objets sacrés et de dévotion, l’expression de leur pouvoir surnaturel et le lien avec leur prototype divin.


Cécile VOYER

LES ÉVANGILES DE L’ABBÉ ODBERT DE SAINT-BERTIN ET LA CRÉATION À LA FIN DU XE SIÈCLE (BOULOGNE, BM, MS. 11)

Le scriptorium de Saint-Bertin est resté actif durant tout le premier Moyen Âge : une soixantaine de manuscrits et de fragments de manuscrits du VIe siècle au début du
XIe siècle a été conservée. Des manuscrits luxueux ont été produits à la période carolingienne, puis des codices d’une remarquable qualité au tournant des Xe – XIe siècles, particulièrement sous l’abbatiat d’Odbert (986-1007), comme le recueil des Vitae sanctorum, comprenant les vies des saints Bertin, Folcuin, Silvin et Winnoc (Boulogne, BM, ms. 107). Le frontispice de ce codex est attribué à Odbert lui-même, tout comme une partie du décor du Psautier-Hymnaire à l’usage de Saint-Bertin (Boulogne, BM, ms. 20). Le langage formel élaboré sous l’abbatiat d’Odbert imprime à la fois l’identité de l’abbaye et son passé glorieux, la richesse et la continuité de son histoire tout en l’adaptant à la culture visuelle du Xe siècle. Si le livre d’ Évangiles d’Odbert (Boulogne, ms. 11) a été orné par un peintre anglo-saxon, l’abbé a probablement réalisé les initiales secondaires. Ce manuscrit somptueux témoigne de la créativité, de l’ inventivité des concepteurs d’images et des préoccupations liées à l’importance prise par l’eucharistie et l’ Incarnation à la fin du Xe siècle. Il permet de questionner à la fois la création artistique de ce Xe siècle, mal connu.


Rémi CORDONNIER

IMAGES MNÉMOTECHNIQUES ET ENSEIGNEMENT CLAUSTRAL : LE CAS DU TRAITÉ DES OISEAUX DE HUGUES DE FOUILLOY (V. 1160) ET DE QUELQUES CLOÎTRES HISTORIÉS DU XIIE SIÈCLE

Le Traité des oiseaux de Hugues de Fouilloy, écrit au milieu du XIIe siècle, comprend un riche cycle iconographique destiné à l’enseignement des illettrés. Nous nous proposons de démontrer que l’ensemble de ce traité sous-tend la connaissance et la pratique des Arts de mémoire, et qu’ il fait écho à la pédagogie de l’ hora locutionis telle qu’elle est décrite dans les sources de l’Abbaye de Saint-Victor de Paris. Cet enseignement se tenant dans le cloître, nous verrons en quoi l’ iconographie du Traité des oiseaux y renvoie, et ouvrirons sur la possible destination mnémonique de l’ iconographie de certains cloîtres médiévaux.


Sébastien BIAY

RÉINVENTER LES VERTUS À CLUNY. IMAGE ROMANE ET CULTURE MONASTIQUE AUTOUR DE 1100

Pour avoir fait couler déjà beaucoup d’encre, les chapiteaux du rond-point de la grande abbatiale de Cluny n’en continuent pas moins de poser de redoutables problèmes de lecture. Cette contribution se focalise sur le chapiteau qui soulève peut-être le plus de questions quant à l’ identité des quatre personnages qui y sont représentés. Alors que le thème des vertus fait relativement consensus parmi les auteurs, il s’agit de proposer de nouvelles hypothèses d’ identification pour chaque figure, et ce faisant de parvenir à une compréhension globale de ce chapiteau malgré la perte de précieux indices du fait de l’iconoclasme protestant (et peut-être aussi de la disparition d’inscriptions peintes). Cette enquête interroge notamment la place des vertus dans le monde monastique autour de 1100 du double point de vue de la culture théologique et de la culture visuelle.


Angélique FERRAND

LA FIGURATION DU ZODIAQUE DANS LE LIEU ECCLÉSIAL COMME MISE EN IMAGE(S) DES RAPPORTS ENTRE CIEL ET TERRE

Au cours du Haut Moyen Âge, le Zodiaque s’est progressivement affirmé comme une image synthétique du cosmos, comme le reflet de l’ordre divin. Étroitement lié au cercle de différentes manières et porteur d’un nombre efficace, les signes du Zodiaque furent utilisés dans les manuscrits liturgiques comme un moyen visuel de signifier l’ordre et comme repères à la fois dans le temps et dans l’espace. La figuration du Zodiaque dans le lieu ecclésial connaît un certain essor au XIIe siècle, qu’il soit associé ou non aux Occupations des mois. À travers plusieurs exemples, il s’agit de donner à voir comment les signes du Zodiaque mettent en image(s) les rapports entre ciel et terre selon différentes modalités. Après avoir observé la localisation et la disposition des figures zodiacales en contexte ecclésial, nous cherchons à montrer que, en particulier au seuil de l’église, les douze signes du ciel renvoient et donnent accès à la Porta coeli. En marge de grands thèmes iconographiques, tels que l’Ascension, l’Assomption ou bien encore le Jugement Dernier, le Zodiaque met en valeur des transitions et contacts entre ciel et terre. Au fil des exemples, nous mettons aussi en lumière une certaine re-sémantisation des signes du Zodiaque dans une perspective chrétienne, sans pour autant que ce phénomène ne soit homogène ni systématique. Il apparaît ainsi que les signes du Zodiaque permettent de penser en images un processus de transitus et la rencontre entre le ciel et la terre dans le lieu ecclésial.


Valentino PACE

IMAGES ROMANES DE L’ITALIE NORMANDE

À la fin du XIe siècle à Aversa (en Campanie) et à Brindisi (dans les Pouilles), les commanditaires normands favorisent la construction de bâtiments importants. Les choix thématiques de sculptures conservées semblent témoigner de leur adhésion à une culture liée à leurs contrées d’origine ou à des territoires proches de celles-ci, exprimée toutefois à travers une différente manière « artistique », pour laquelle il est difficile de trouver d’étroites comparaisons. Les traces d’un lointain héritage scandinave se mêlent à un souvenir des choix d’ iconographie de leurs contrées lointaines, parfois transformées par une sensibilité différente, où l’on perçoit contacts avec le monde islamique. Ces sculptures façonnent un « nouveau monde » d’ images, témoignant non pas d’une confrontation, mais d’une rencontre ouverte et réceptive entre l’ Europe du Nord et une terre de la Méditerranée.


Xavier BARRAL I ALTET

APPROCHES HISTORIOGRAPHIQUES DE L’IMAGE ROMANE : DES COMPILATEURS DU XIXE SIÈCLE AUX NOUVELLES MÉTHODES INTERPRÉTATIVES SUR LA ‘VÉRITÉ’ DES IMAGES

L’ histoire de l’iconographie du point de vue de l’approche des images a connu selon moi deux grandes périodes. La première commence au XIXe siècle, parcourt presque tout le XXe siècle. Elle est jalonnée par les grands noms de la discipline. La deuxième voie commence en 1990 avec l’ouvrage de Hans Belting, Bild und Kult. Au XIXe
siècle, les manuels d’ iconographie cherchaient à expliquer le symbolisme des images chrétiennes. Suivront les différentes approches méthodologiques, Mâle, Warburg, Millet, Panofsky, Grabar et jusqu’ à l’après Belting. Après des décennies de théorisations sur l’ image, aujourd’hui on s’intéresse à l’oralité, la performativité des images médiévales, à leur activation corporelle, sensorielle et visuelle, et on prend en considération les images parlantes et mobiles.


Michel DESMIER-OLIVERES

LES PEINTURES MURALES DE L’ÉGLISE NOSTRA SENORA DEL ROURE À TAILLET (PYRÉNÉES-ORIENTALES) : NOUVELLES OBSERVATIONS

L’article vient mettre en évidence des éléments nouveaux sur les peintures murales de l’église Nostra Senyora del Roure de Taillet : un décor que nous datons de la seconde moitié du XIIème siècle qui n’avait jamais fait l’objet d’une étude approfondie. Ces travaux viennent soulever des questions quant à l’origine et la place d’un tel décor peint au sein d’un espace de production artistique bien défini : les « vallées catalanes transfrontalières ». Ce territoire a vu naître, au XIème siècle, toute une iconographie singulière dont les motifs vont se multiplier, s’alimenter, créant ainsi des similitudes ou des divergences. Tous ces éléments sont autant d’ indices qui nous ont permis de tenter d’ imaginer les origines des choix iconographiques pour les peintures murales de Taillet. Cette quête des images nous a également permis de nous positionner quant à la partie manquante du décor peint. Enfin, ces travaux de recherches entrent dans le cadre de la valorisation du patrimoine du Pays d’Art et d’ Histoire transfrontalier des Vallées Catalanes du Tech et du Ter.


Kornélia ROSZA

UN NOUVEAU REGARD SUR L’ÉGLISE SAINT-FRAMBOURG À SENLIS

Une partie des vestiges mis au jour sous la chapelle Saint-Frambourg à Senlis (60) ont été identifiés comme appartenant à un édifice religieux fondé par la reine Adélaïde,
épouse d’Hugues Capet, vers l’an mil. Une synthèse d’ensemble sur la formation et l’évolution historique du lieu a été élaborée à partir de la documentation liées aux fouilles passées (1974, 1996, 2000) et d’une analyse systématique du terrain dans le sous-sol archéologique. Cet article présente un regard renouvelé sur la construction de cette première église, son implantation, sa mise en oeuvre et comprend une analyse des fresques conservées sur deux pilastres et représentant deux évêques.


Élise HADDAD

ICONOGRAPHIE DU PORTAIL SUD À BEAULIEU-SUR-DORDOGNE : UNE MISE EN IMAGE ORIGINALE DE L’APOCALYPSE

Le portail Sud de l’église abbatiale de Beaulieu-sur-Dordogne, et son tympan en particulier, quoique connu depuis bien longtemps, était encore mal déchiffré, notamment
pour ce qui concerne sa partie basse : deux registres de monstres parfois interprétés comme une représentation maladroite de l’ Enfer. Cet article propose une relecture iconographique des motifs qui le composent, en particulier des bêtes apocalyptiques : Bête de la Mer, Bête de la Terre, dragon et locustes, ainsi qu’une interprétation globale de la composition, et des enjeux qui ont conduit les concepteurs du tympan à mobiliser ces motifs.


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