Valentino Pace, université d’Udine (Italie)

Dans le domaine de l’histoire de l’art et de l’architecture, la présence des nouveaux maîtres normands dans le sud de l’Italie a créé non seulement un nouveau panorama architectural — les cathédrales nouvellement fondées (Aversa, Acerenza, Venosa, etc.) sont caractérisées par des plans et des structures renvoyant de diverses manières à leur terre d’origine — mais aussi un nouveau panorama figuratif. Notre communication étudiera un petit corpus d’images dont le point commun est d’avoir été commanditées par « les Normands”.

Il s’agira en premier lieu du « relief du chevalier » d’Aversa, exécuté avant 1091 pour la cathédrale du moine bénédictin et évêque normand Guitmond, originaire de La Croix-Saint-Leufroy, en charge du diocèse entre 1078 et 1084, avec la participation du prince normand Richard Quarrel Drengot et de son fils Giordano, originaires d’Alençon. Son sujet allégorique, la Victoire du bien sur le mal, est ici mis en exergue dans un contexte de culture mythologique, orale, qui rappelle les sagas christianisées du nord (comme le Beowulf) et qui n’a pu être introduit dans le sud de l’Italie que par les nouveaux conquérants, en contact avec le monde anglo-saxon.

Nous traiterons dans un deuxième temps de l’église monastique de San Benedetto à Brindisi, fondée par le « dominator » normand Godefroi de Conversano, issu de la famille même de Robert Guiscard, et de son épouse Sigilgaita (1090). Dans ce «premier» linteau figuré du sud de l’Italie, le même thème de la victoire du bien sur le mal revient, avec une nouvelle et significative convergence de modèles anciens, islamiques et peut-être aussi carolingiens.

Le troisième et le plus extraordinaire exemple est celui d’un chapiteau monumental initialement situé dans l’église de Sant’Andrea sur l’île, fondée par le même Godefroi, dans les années 1090. Le chapiteau présente une extraordinaire «carole» normande et est le plus ancien témoignage figuratif de ce thème, inconnu des historiens de la musique et de la danse. Les vêtements des douze personnages (4 femmes et 8 chevaliers) qui se tiennent par la main en tournant autour du chapiteau semblent également rappeler certaines caractéristiques de la Broderie de Bayeux. Le chapiteau témoigne de l’importation dans le sud de l’Italie d’un thème cher à la culture aristocratique des nouveaux dirigeants.

Ensemble, ces trois exemples se rejoignent et montrent la grande importance de cette nouvelle présence et des ambitions de cette élite d’hommes venus du Nord.

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